Passionné d’arts martiaux Japonais, en l’occurrence l’Aïkido que je pratique maintenant depuis 40 ans, en parallèle dans le cadre de ma découverte des différents Framework ou méthodes tel que ITIL, PRINCE2, SCRUM… différents rapprochements me sont apparus comme évidents, en particulier avec la philosophie Agile.
Plus précisément, je pense au concept de Shoshin qui vient du japonais et est composé de deux kanji : “sho” (初) qui signifie “commencement” ou “origine”, et “shin” (心) qui signifie “esprit”, “âme” ou "attitude". Ensemble, ils forment l’expression que l’on pourrait traduire par "esprit du débutant". Ce concept est particulièrement important dans le bouddhisme zen et les arts martiaux japonais. Il représente une attitude d’humilité et d’ouverture, où l’on aborde chaque nouvelle expérience avec la curiosité et l’enthousiasme d’un débutant, indépendamment de son niveau de compétence.
Cette attitude d’ouverture, de curiosité et d’absence de préjugés, même lorsque l’on est expert dans un domaine, est une approche particulièrement en phase avec la philosophie Agile, qui valorisent l’adaptabilité, la collaboration et l’amélioration continue.
En entreprise, adopter l’état d’esprit Shoshin se traduit par exemple en abordant chaque projet avec une mentalité de débutant, même si l’on possède une grande expérience. Cela implique entre autres :
- Curiosité et Ouverture : Toujours chercher à apprendre et à comprendre de nouvelles perspectives.
- Humilité : Reconnaître que l’on ne sait pas tout et être prêt à accepter les idées des autres.
- Adaptabilité : Être prêt à changer de direction en fonction des retours et des nouvelles informations.
- Collaboration : Travailler en étroite collaboration avec les membres de l’équipe et les parties prenantes pour co-créer des solutions
D’ailleurs, en 1985, Steve Jobs a été congédié publiquement d’Apple. Lors de son discours d’ouverture en 2005 à Stanford, il avait dit “Je ne l’ai pas vu à ce moment-là, mais il s’est avéré que se faire virer d’Apple était la meilleure chose qui pouvait m’arriver. La lourdeur de réussir a été remplacée par la légèreté d’être un débutant à nouveau, moins sûr de tout. Cela m’a libéré pour entrer dans l’une des périodes les plus créatives de ma vie.” De plus, les biographes qui explorent les origines du génie de Steve Jobs mettent souvent en avant son engagement profond dans le bouddhisme zen. La légende raconte que les lignes épurées de ses créations sont fortement influencées par les principes et idéaux de cette discipline, en particulier le minimalisme et la méditation.
Citons également Ed Catmull, cofondateur de Pixar, qui décrit le Shoshin dans son livre Creativity Inc, comme une méthode idéale pour accepter la nature imprévisible du processus créatif.
L’écoute des autres et le feed-back sont donc d’une importance essentielle, pour reprendre Confucius « La vraie connaissance est de connaître l’étendue de son ignorance. ». Confucius n’est pas le seul à l’affirmer, Socrate, Isaac Newton, Molière et bien d’autres…. Pour autant nous sommes nombreux à continuer de croire à l’illusoire exhaustivité de nos connaissances. Le feedback est un moyen de douter, de rester éveillé, de rester à l’écoute afin d’élever notre capacité d’innovation et de réduire nos temps de réactivité. A ce titre, le concept de MVP (Minimum Viable Product) qui s’inscrit dans le Lean Startup, consiste à lancer un produit en se basant sur l’expérimentation, en est une des illustrations : il s’agit d’une version minimale d’un produit permettant de tester une hypothèse auprès de parties prenantes et de mieux comprendre leurs attentes en suscitant des réactions. Cela permet de tester un concept en investissant le moins possible avant d’être sûr de l’apport de valeur et que l’investissement ne sera pas à perte (Il n’est donc pas nécessaire de construire complétement le produit ou la fonctionnalité pour valider l’adhésion). Ainsi, même si nous pensons avoir une idée d’une solution (avec plus ou moins de certitude), le concept de MVP nous invite à douter, tester une hypothèse et apprendre en marchant sur la base des retours des autres : n’est pas une forme de shoshin ?
En conclusion, dans le cadre des projets, du développement de produits, ou plus largement d’une entreprise, adopter l’état d’esprit Shoshin permet de mieux naviguer dans l’incertitude et de répondre efficacement aux défis. Cela favorise une culture d’innovation, où les erreurs sont vues comme des opportunités d’apprentissage et où l’amélioration continue est au cœur des préoccupations. En intégrant ce concept dans les pratiques et les esprits, cela peut certainement contribuer à transformer la manière dont les entreprises abordent les projets et le développement de produits, en cultivant l’écoute, curiosité, l’humilité et la collaboration.
En vous souhaitant un bon cheminement dans la voie du Shoshin 😊
Olivier PATOUT
Consultant/Formateur ITI, PRINCE2, et Agile.